«La liberté d’information est un leurre, si l’information sur les
faits n’est pas garantie et si ce n’est pas les faits eux-mêmes qui font
l’objet du débat» Hanna Arendt.
La propagande est à la démocratie, Ce que la violence est à la dictature». Noam Chomsky
I- De la guerre sémantique
A- Le langage comme marqueur d’identité culturelle
La liberté d’information, un des fondements de la démocratie, existe, mais uniquement pour ceux qui en maitrisent les codes. La bataille de Syrie en apporte quotidiennement la preuve.
L’individu n’est pas un moulin à paroles. Les mots ont un sens et ne constituent pas une enfilade de paroles verbales. Les mots ne sont pas neutres, ni innocents. Les mots tuent parfois. Cela est encore plus vrai pour les Etats, particulièrement en période de guerre.
Guerre psychologique autant que guerre sémantique, la guerre médiatique vise à soumettre l’auditeur récepteur à la propre dialectique de l’émetteur, en l’occurrence la puissance émettrice en lui imposant son propre vocabulaire, et, au-delà, sa propre conception du monde.
Dans ce contexte, le langage est un marqueur d’identité culturelle de la même manière que les empreintes digitales, le code génétique, les mesures anthropométriques sont des marqueurs biologiques et physiques.
L’accent, l’usage des termes, le ton révèlent l’identité culturelle de l’être. Sous une apparence trompeuse, des termes généraux, lisses et impersonnels, le langage est codifié et pacifié. Il devient alors un redoutable instrument de sélection et de discrimination.
Un Plan social renvoie à une réalité immatérielle contrairement au terme douloureux de licenciement massif. De même qu’ «externalisation et sous-traitance» à des opérateurs fonctionnant en dehors des normes de la législation sociale. «Délocalisation» masque une opération visant à optimiser le rendement en exploitant une main d’œuvre bon marché et surexploitée des pays pauvres et souvent dictatoriaux, sans la moindre protection sociale. «Privatisation», une opération qui consiste souvent à transférer à des capitalistes des entreprises du service public souvent renflouées par les deniers publics, c’est-à-dire les contribuables.
Même au niveau du discours politique le langage est aseptisé au point que l’ancien premier ministre socialiste Pierre Mauroy avait reproché au candidat socialiste aux présidentielles de 2002, Lionel Jospin, d’avoir gommé dans son discours le terme de «travailleurs».
Dans le langage convenu, l’on préfère le terme pudique de «Gens de condition modeste» à celui plus parlant de «pauvres» de même pour le tandem «Exclus et «exploités». Ou encore «Classes» (qui suggère idée de lutte) et couches sociales. Couches comme couches de peinture.
Le langage est connoté. A l’instar du Syllabus papal du XIX me siècle, qui prohibait l’usage de certains termes tels laicité ou séparation Eglise Etats, le seul licite à l’époque contemporaine est le LQR «Lingua Quintae Respublicae», le langage en vogue sous la Vme République Française, homologué, estampillé. En raison sans doute du rôle moteur de la France dans les «guerres de libération» du Monde arabe.
(Cf. A ce propos Eric Hazan: LQR : La propagande du quotidien (Raisons d’agir éditions)
Gare à quiconque recourt à un langage personnalisé, forgé dans un vocabulaire qui lui est propre. L’homme risque l’ostracisme, aussitôt mis à l’index, affublé d’une tare absolue, irrémédiable: «ringard», «tricard», etc.
La Langue substitue aux mots de l’émancipation et de la subversion, ceux de la conformité et de la soumission. L’on prône la flexibilité au lieu de la précarité, dans un pays qui a érigé la rente de situation en un privilège à vie, notamment au sein de la haute fonction publique. Les Enarques ont une rente de situation à vie, mais quiconque ose relever cette incongruité est accusé de faire le lit du «populisme».
Il en est de même au niveau diplomatique: Problème du Moyen Orient ou Question d’Orient. Pour un problème, la réponse est unique, le problème ouvre la voie à des experts qui doivent techniquement apporter la solution. Mais la question d’Orient est plus floue. Une question suggère des réponses multiples, et induit l’absence de solution immédiate. Selon que vous utilisez un terme ou l’autre vous serez classé «moderne et dynamique» ou «ringard».
Un exemple «Le Figaro» du 28 Août 2004 titre en manchettes «L’aveu du président Bush», sans que le journal ne précise en quoi consistait cet aveu, à propos de quoi. Dix ans auparavant, tout autre journal complaisant aurait titré: «Le président Bush admet son échec dans ses prévision sur l’Irak».
Mais si par malheur un journaliste audacieux avait titré la stricte vérité « Bush, le grand perdant de la guerre d’Irak», il aurait été aussitôt accusé d’«anti-américanisme primaire». La «Novlangue» résulte de la présence de plus en plus manifeste de décideurs- économistes et publicitaires- dans le circuit de la communication, assurant une installation en douceur de la pensée néolibérale.
Si la diffusion hertzienne est la moins polluante des armes sur le plan de l’écologie, elle est, en revanche, la plus corrosive sur le plan de l’esprit. Son effet est à long terme. Le phénomène d’interférence opère un lent conditionnement pour finir par subvertir et façonner le mode de vie et l’imaginaire créatif de la collectivité humaine ciblée. Nulle trace d’un dégât immédiat ou d’un dommage collatéral. Point besoin d’une frappe chirurgicale ou d’un choc frontal.
Dans la guerre des ondes règne le domaine de l’imperceptible, de l’insidieux, du captieux et du subliminal. Qui se souvient encore de «Tal Ar-Rabih» (La colline du printemps)? Près d’un siècle d’émissions successives et répétitives a dissipé ce nom mélodieux, synonyme de douceur de vivre, pour lui substituer dans la mémoire collective une réalité nouvelle.
“Tal AR-Rabih” est désormais mondialement connu, y compris au sein des nouvelles générations arabes, par sa nouvelle désignation hébraïque, Tel Aviv, la grande métropole israélienne. Le travail de sape est permanent et le combat inégal. Il en est de même des expressions connotées.
L’extermination d’une population en raison de ses origines s’appelle en français «génocide».
Il en est ainsi du génocide arménien en Turquie, comme du génocide des Tutsis au Rwanda. Lui préférer l’expression hébraïque du terme biblique de «Shoah» (holocauste) signe son appartenance au camp pro-israélien. Israël n’a jamais reconnu le caractère de «génocide» aux massacres des Arméniens en Turquie au début du XX me siècle, sans doute pour marquer le caractère unique des persécutions dont les Juifs ont été victimes en Europe. D’abord en Russie, les «pogroms» de la fin du XIX me siècle, puis en Allemagne et en France durant la Seconde Guerre mondiale (1939-45).
Il en est aussi des termes antisémitisme et antiracisme. Arabes et Juifs sont des sémites, mais l’antisémitisme ne concerne que les Juifs, pour se distinguer des autres, alors que l’antiracisme englobe Arabes, Noirs, Musulmans, Asiatiques etc..
Le Président Jacques Chirac, lui-même, en fustigeant «l’antisémitisme et le racisme» dans son discours d’adieu, le 27 mars 2006, a consacré dans l’ordre subliminal un racisme institutionnel.
Jusqu’à présent, les pays occidentaux en général, les Etats-Unis en particulier, auront exercé le monopole du récit médiatique, un monopole considérablement propice aux manipulations de l’esprit, qui sera toutefois brisé à deux reprises avec fracas avec des conséquences dommageables pour la politique occidentale:
-La première fois en Iran, en 1978-1979, lors de la «Révolution des cassettes» du nom de ces bandes enregistrées des sermons de l’Imam Ruhollah Khomeiny du temps de son exil en France et commercialisées depuis l’Allemagne pour soulever la population iranienne contre le Chah d’Iran,
-La deuxième fois à l’occasion de l’Irangate en 1986, le scandale des ventes d’armes américaines à l’Iran pour le financement de la subversion contre le Nicaragua, qui a éclaté au grand jour par suite d’une fuite dans un quotidien de Beyrouth «As-Shirah», mettant sérieusement à mal l’administration républicaine du président Ronald Reagan.
Hormis ces deux cas, les Etats-Unis auront constamment cherché à rendre leurs ennemis inaudibles, au besoin en les discréditant avec des puissants relais locaux ou internationaux, tout en amplifiant leur offensive médiatique, noyant les auditeurs sous un flot d’informations, pratiquant la désinformation par une perte de repères due à la surinformation en vue de faire des auditeurs lecteurs de parfaits «analphabètes secondaires», pour reprendre l’expression de l’allemand Hans Magnus Einsenberger (2).
Non des illettrés, ou des incultes, mais des êtres étymologiquement en phase de processus de «désorientation», psychologiquement conditionné et réorienté dans le sens souhaité.
Pur produit de la phase de l’industrialisation, de l’hégémonie culturelle du Nord sur le Sud, de l’imposition culturelle comme un préalable à l’envahissement et à l’enrichissement des marchés, «l’analphabète secondaire n’est pas à plaindre. La perte de mémoire dont il est affligé ne le fait point souffrir. Son manque d’obstination lui rend les choses faciles.
Une inversion radicale du schéma économique se produit et la loi de l’offre et de la demande se décline désormais selon un mode radicalement différent: la fabrication du désir de consommation détermine désormais l’activité d’une entreprise.
Ce n’est plus le consommateur qui commande le rythme de la production mais le producteur qui orchestre désormais le désir de consommation. Le contrôle de l’appareil de production parait compter désormais moins que la maîtrise de la demande de consommation.
Le citoyen actif cède ainsi le pas au consommateur passif, l’aventurier de l’esprit au téléphage, le journaliste à l’animateur de divertissement, le patron de presse au capitaliste, entraînant du coup le glissement du journalisme vers le règne de l’«infotainement» néologisme provenant de la contraction de l’information et de l’Entertainment (terme américain de divertissement).
La mondialisation des flux d’information permet ainsi la mise sous perfusion éditoriale d’un organe de presse et par voie de conséquence la sédentarisation professionnelle de l’information, stade ultime de l’analphabétisme secondaire. Toutefois ce viol du monde par la publicité et la propagande par la profusion des sons et des images, dans le paysage urbain, sur les écrans dans la presse, au sein même des foyers, se heurte à des résistances éparses mais fermes.
De même que le monopole du savoir par la technocratie est battu en brèche, sur le plan international, par des contre-pouvoirs notamment les acteurs paraétatiques (Greenpeace, Médecins sans frontières, Confédération paysanne), démultipliant les sources d’information non contrôlées, de même l’informatique a développé au niveau de l’information une sphère d’autonomie contestataire à l’ordre mondial américain. Chaque percée technologique s’est accompagnée d’une parade.
A la cassette du temps de la révolution khomeyniste a succédé le fax puis les sites Internet enfin le blog, le journal électronique en ligne, le tweet, dont le développement s’est accéléré depuis la guerre d’Irak et la dernière campagne présidentielle de George Bush jr (2004), des parades qui retentissent comme la marque d’une revanche de l’esprit contestataire et de la sphère de la liberté individuelle, en réaction au matraquage de la propagande et la concentration capitalistique des médias.
II – De la Syrie
Ce propos est explicatif. Il ne comporte pas justificatif. Au-delà d’un régime contestable, il importe de pérenniser la Syrie. La destruction d’un régime, si critiquable soit-il, ne justifie pas le démantèlement d’un pays, qui constitue un joyau de la civilisation, un foyer de la coexistence interconfessionnelle et du nationalisme militant.
Pour qu’une Syrie laïque et démocratique puisse voir le jour, il importe de clarifier les termes du débat, de démasquer les conspirateurs et de mettre un terme à l’enfumage médiatique qui brouille les enjeux.
Sur les enjeux de la bataille de Syrie Cf à ce propos
René NabaLa propagande est à la démocratie, Ce que la violence est à la dictature». Noam Chomsky
I- De la guerre sémantique
A- Le langage comme marqueur d’identité culturelle
La liberté d’information, un des fondements de la démocratie, existe, mais uniquement pour ceux qui en maitrisent les codes. La bataille de Syrie en apporte quotidiennement la preuve.
L’individu n’est pas un moulin à paroles. Les mots ont un sens et ne constituent pas une enfilade de paroles verbales. Les mots ne sont pas neutres, ni innocents. Les mots tuent parfois. Cela est encore plus vrai pour les Etats, particulièrement en période de guerre.
Guerre psychologique autant que guerre sémantique, la guerre médiatique vise à soumettre l’auditeur récepteur à la propre dialectique de l’émetteur, en l’occurrence la puissance émettrice en lui imposant son propre vocabulaire, et, au-delà, sa propre conception du monde.
Dans ce contexte, le langage est un marqueur d’identité culturelle de la même manière que les empreintes digitales, le code génétique, les mesures anthropométriques sont des marqueurs biologiques et physiques.
L’accent, l’usage des termes, le ton révèlent l’identité culturelle de l’être. Sous une apparence trompeuse, des termes généraux, lisses et impersonnels, le langage est codifié et pacifié. Il devient alors un redoutable instrument de sélection et de discrimination.
Un Plan social renvoie à une réalité immatérielle contrairement au terme douloureux de licenciement massif. De même qu’ «externalisation et sous-traitance» à des opérateurs fonctionnant en dehors des normes de la législation sociale. «Délocalisation» masque une opération visant à optimiser le rendement en exploitant une main d’œuvre bon marché et surexploitée des pays pauvres et souvent dictatoriaux, sans la moindre protection sociale. «Privatisation», une opération qui consiste souvent à transférer à des capitalistes des entreprises du service public souvent renflouées par les deniers publics, c’est-à-dire les contribuables.
Même au niveau du discours politique le langage est aseptisé au point que l’ancien premier ministre socialiste Pierre Mauroy avait reproché au candidat socialiste aux présidentielles de 2002, Lionel Jospin, d’avoir gommé dans son discours le terme de «travailleurs».
Dans le langage convenu, l’on préfère le terme pudique de «Gens de condition modeste» à celui plus parlant de «pauvres» de même pour le tandem «Exclus et «exploités». Ou encore «Classes» (qui suggère idée de lutte) et couches sociales. Couches comme couches de peinture.
Le langage est connoté. A l’instar du Syllabus papal du XIX me siècle, qui prohibait l’usage de certains termes tels laicité ou séparation Eglise Etats, le seul licite à l’époque contemporaine est le LQR «Lingua Quintae Respublicae», le langage en vogue sous la Vme République Française, homologué, estampillé. En raison sans doute du rôle moteur de la France dans les «guerres de libération» du Monde arabe.
(Cf. A ce propos Eric Hazan: LQR : La propagande du quotidien (Raisons d’agir éditions)
Gare à quiconque recourt à un langage personnalisé, forgé dans un vocabulaire qui lui est propre. L’homme risque l’ostracisme, aussitôt mis à l’index, affublé d’une tare absolue, irrémédiable: «ringard», «tricard», etc.
La Langue substitue aux mots de l’émancipation et de la subversion, ceux de la conformité et de la soumission. L’on prône la flexibilité au lieu de la précarité, dans un pays qui a érigé la rente de situation en un privilège à vie, notamment au sein de la haute fonction publique. Les Enarques ont une rente de situation à vie, mais quiconque ose relever cette incongruité est accusé de faire le lit du «populisme».
Il en est de même au niveau diplomatique: Problème du Moyen Orient ou Question d’Orient. Pour un problème, la réponse est unique, le problème ouvre la voie à des experts qui doivent techniquement apporter la solution. Mais la question d’Orient est plus floue. Une question suggère des réponses multiples, et induit l’absence de solution immédiate. Selon que vous utilisez un terme ou l’autre vous serez classé «moderne et dynamique» ou «ringard».
Un exemple «Le Figaro» du 28 Août 2004 titre en manchettes «L’aveu du président Bush», sans que le journal ne précise en quoi consistait cet aveu, à propos de quoi. Dix ans auparavant, tout autre journal complaisant aurait titré: «Le président Bush admet son échec dans ses prévision sur l’Irak».
Mais si par malheur un journaliste audacieux avait titré la stricte vérité « Bush, le grand perdant de la guerre d’Irak», il aurait été aussitôt accusé d’«anti-américanisme primaire». La «Novlangue» résulte de la présence de plus en plus manifeste de décideurs- économistes et publicitaires- dans le circuit de la communication, assurant une installation en douceur de la pensée néolibérale.
Si la diffusion hertzienne est la moins polluante des armes sur le plan de l’écologie, elle est, en revanche, la plus corrosive sur le plan de l’esprit. Son effet est à long terme. Le phénomène d’interférence opère un lent conditionnement pour finir par subvertir et façonner le mode de vie et l’imaginaire créatif de la collectivité humaine ciblée. Nulle trace d’un dégât immédiat ou d’un dommage collatéral. Point besoin d’une frappe chirurgicale ou d’un choc frontal.
Dans la guerre des ondes règne le domaine de l’imperceptible, de l’insidieux, du captieux et du subliminal. Qui se souvient encore de «Tal Ar-Rabih» (La colline du printemps)? Près d’un siècle d’émissions successives et répétitives a dissipé ce nom mélodieux, synonyme de douceur de vivre, pour lui substituer dans la mémoire collective une réalité nouvelle.
“Tal AR-Rabih” est désormais mondialement connu, y compris au sein des nouvelles générations arabes, par sa nouvelle désignation hébraïque, Tel Aviv, la grande métropole israélienne. Le travail de sape est permanent et le combat inégal. Il en est de même des expressions connotées.
L’extermination d’une population en raison de ses origines s’appelle en français «génocide».
Il en est ainsi du génocide arménien en Turquie, comme du génocide des Tutsis au Rwanda. Lui préférer l’expression hébraïque du terme biblique de «Shoah» (holocauste) signe son appartenance au camp pro-israélien. Israël n’a jamais reconnu le caractère de «génocide» aux massacres des Arméniens en Turquie au début du XX me siècle, sans doute pour marquer le caractère unique des persécutions dont les Juifs ont été victimes en Europe. D’abord en Russie, les «pogroms» de la fin du XIX me siècle, puis en Allemagne et en France durant la Seconde Guerre mondiale (1939-45).
Il en est aussi des termes antisémitisme et antiracisme. Arabes et Juifs sont des sémites, mais l’antisémitisme ne concerne que les Juifs, pour se distinguer des autres, alors que l’antiracisme englobe Arabes, Noirs, Musulmans, Asiatiques etc..
Le Président Jacques Chirac, lui-même, en fustigeant «l’antisémitisme et le racisme» dans son discours d’adieu, le 27 mars 2006, a consacré dans l’ordre subliminal un racisme institutionnel.
Jusqu’à présent, les pays occidentaux en général, les Etats-Unis en particulier, auront exercé le monopole du récit médiatique, un monopole considérablement propice aux manipulations de l’esprit, qui sera toutefois brisé à deux reprises avec fracas avec des conséquences dommageables pour la politique occidentale:
-La première fois en Iran, en 1978-1979, lors de la «Révolution des cassettes» du nom de ces bandes enregistrées des sermons de l’Imam Ruhollah Khomeiny du temps de son exil en France et commercialisées depuis l’Allemagne pour soulever la population iranienne contre le Chah d’Iran,
-La deuxième fois à l’occasion de l’Irangate en 1986, le scandale des ventes d’armes américaines à l’Iran pour le financement de la subversion contre le Nicaragua, qui a éclaté au grand jour par suite d’une fuite dans un quotidien de Beyrouth «As-Shirah», mettant sérieusement à mal l’administration républicaine du président Ronald Reagan.
Hormis ces deux cas, les Etats-Unis auront constamment cherché à rendre leurs ennemis inaudibles, au besoin en les discréditant avec des puissants relais locaux ou internationaux, tout en amplifiant leur offensive médiatique, noyant les auditeurs sous un flot d’informations, pratiquant la désinformation par une perte de repères due à la surinformation en vue de faire des auditeurs lecteurs de parfaits «analphabètes secondaires», pour reprendre l’expression de l’allemand Hans Magnus Einsenberger (2).
Non des illettrés, ou des incultes, mais des êtres étymologiquement en phase de processus de «désorientation», psychologiquement conditionné et réorienté dans le sens souhaité.
Pur produit de la phase de l’industrialisation, de l’hégémonie culturelle du Nord sur le Sud, de l’imposition culturelle comme un préalable à l’envahissement et à l’enrichissement des marchés, «l’analphabète secondaire n’est pas à plaindre. La perte de mémoire dont il est affligé ne le fait point souffrir. Son manque d’obstination lui rend les choses faciles.
Une inversion radicale du schéma économique se produit et la loi de l’offre et de la demande se décline désormais selon un mode radicalement différent: la fabrication du désir de consommation détermine désormais l’activité d’une entreprise.
Ce n’est plus le consommateur qui commande le rythme de la production mais le producteur qui orchestre désormais le désir de consommation. Le contrôle de l’appareil de production parait compter désormais moins que la maîtrise de la demande de consommation.
Le citoyen actif cède ainsi le pas au consommateur passif, l’aventurier de l’esprit au téléphage, le journaliste à l’animateur de divertissement, le patron de presse au capitaliste, entraînant du coup le glissement du journalisme vers le règne de l’«infotainement» néologisme provenant de la contraction de l’information et de l’Entertainment (terme américain de divertissement).
La mondialisation des flux d’information permet ainsi la mise sous perfusion éditoriale d’un organe de presse et par voie de conséquence la sédentarisation professionnelle de l’information, stade ultime de l’analphabétisme secondaire. Toutefois ce viol du monde par la publicité et la propagande par la profusion des sons et des images, dans le paysage urbain, sur les écrans dans la presse, au sein même des foyers, se heurte à des résistances éparses mais fermes.
De même que le monopole du savoir par la technocratie est battu en brèche, sur le plan international, par des contre-pouvoirs notamment les acteurs paraétatiques (Greenpeace, Médecins sans frontières, Confédération paysanne), démultipliant les sources d’information non contrôlées, de même l’informatique a développé au niveau de l’information une sphère d’autonomie contestataire à l’ordre mondial américain. Chaque percée technologique s’est accompagnée d’une parade.
A la cassette du temps de la révolution khomeyniste a succédé le fax puis les sites Internet enfin le blog, le journal électronique en ligne, le tweet, dont le développement s’est accéléré depuis la guerre d’Irak et la dernière campagne présidentielle de George Bush jr (2004), des parades qui retentissent comme la marque d’une revanche de l’esprit contestataire et de la sphère de la liberté individuelle, en réaction au matraquage de la propagande et la concentration capitalistique des médias.
II – De la Syrie
Ce propos est explicatif. Il ne comporte pas justificatif. Au-delà d’un régime contestable, il importe de pérenniser la Syrie. La destruction d’un régime, si critiquable soit-il, ne justifie pas le démantèlement d’un pays, qui constitue un joyau de la civilisation, un foyer de la coexistence interconfessionnelle et du nationalisme militant.
Pour qu’une Syrie laïque et démocratique puisse voir le jour, il importe de clarifier les termes du débat, de démasquer les conspirateurs et de mettre un terme à l’enfumage médiatique qui brouille les enjeux.
Sur les enjeux de la bataille de Syrie Cf à ce propos
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